PF17 – RIE III une réforme indispensable

Sous des pressions extérieures (Union Européenne, OCDE, G20), le Conseil fédéral a entrepris la troisième réforme de l’imposition des entreprises.  Si la concurrence fiscale actuelle entre les cantons Suisses ne pose pas de problème, ce sont les « régimes » fiscaux différenciés selon le type d’entreprise (holdings, sociétés mixtes, sociétés de domicile) qui sont dans le viseur. La Suisse compte environ 24’000 de ces sociétés bénéficiant d’un régime de faveur. Selon l’Administration fédérale des contributions elles représentent entre 150’000 et 180’000 emplois directs.

Pour ces entreprises, les bénéfices selon qu’il sont de source Suisse ou de source étrangère ne sont pas imposés de la même manière. Cette particularité contribue fortement au fait qu’il existe bon nombre de multinationales installées en Suisse, ce qui déplait vivement à nos pays voisins. L’enjeu de la réforme est donc de sauvegarder l’attractivité et la compétitivité de notre place financière alors que les recettes fiscales de ces sociétés représentent environ la moitié des recettes de l’impôt federal direct. Dans le canton de Vaud les sociétés au bénéfice des statuts spéciaux paient 28,6% de l’impôt des sociétés, 31,6% pour Genève, mais seulement 7,5% pour Zurich (on voit ici à quel point les cantons n’ont pas les mêmes intérêts). Les risques financiers sont donc considérables.

Rappelons qu’il s’agit de la suppression de statuts fiscaux cantonaux alors que ceux-ci n’existent pas au niveau fédéral. Afin de rester compétitif, une réduction des taux d’impôt cantonaux est à venir (taux unique d’imposition) : Vaud 13,79% contre 21,37%; Genève 13,49%; contre 24,2%; Fribourg 13,72% contre 19,9%; Neuchâtel 15,6%. De plus, de nouveaux instruments fiscaux vont être créés, il s’agit de la « Patent Box » qui permettra d’imposer de manière privilégiée les revenus  provenant de la propriété intellectuelle (au niveau cantonal uniquement). Le bénéfice net imputable aux brevets et aux droits comparables est imposé avec une réduction de 90%.

Au niveau international les nouveaux taux sont à comparer avec ceux de pays « concurrents » de la Suisse pour l’installation de sièges de multinationales, par exemple: l’Irlande (12,5%), Hong Kong (16,5%) ou Singapour (17%).

Les multinationales de l’arc lémaniques (GEM – Groupement des Entreprises Multinationales) accueillent favorablement ces réformes, le taux d’impôt restant dans une large mesure inférieur à ce qui ce pratique dans l’UE. Ce sont probablement plutôt les difficultés de recrutement qui pourraient créer des doutes sur leur maintient en Suisse mais le groupement espère une mise en place rapide afin de lever le climat d’incertitude.

La perte pour la Confédération et les cantons est devisée à 3 milliards, pour les Villes et les communes le montant est de 1,5 milliards. La Confédération compensera la moitié des pertes fiscales (la péréquation devra également être adaptée) en augmentant la part des cantons au produit de l’impôt fédéral direct de 17% à 21,2%.

Le canton de Vaud s’est démarqué en février 2017 lorsqu’il a accepté la réforme alors qu’au niveau Suisse celle-ci a été rejetée à 60%. Quelques mois après le votre du peuple, le Conseil fédéral a adopté un plan B qu’il a appelé Projet fiscal 17. Le Conseil fédéral a fixé le 31 janvier 2018 les lignes directrices du message relatif à la PF17 et il a communiqué son message le 21 mars 2018.  Le Conseil des Etats a débattu et accepté en juin le projet de loi fédérale relative à la réforme fiscale et au financement de l’AVS (RFFA). Le Conseil national en débattra lors de la session d’automne. Si aucun référendum n’est lancé, les premières mesures d’abrogation des statuts spéciaux pourraient entrer en vigueur en 2019, les cantons ayant besoin de temps pour adapter leur loi, en finalité, la PF17 ne sera pas applicable avant 2020.

De son côté le canton de Vaud a récemment annoncé l’entrée en vigueur de sa RIE III, le canton n’attendant par le plan B au niveau fédéral. Le taux harmonisé pour les personnes morales passant à 13,79% dès le 1er janvier 2019. Du fait de son anticipation sur la réforme fédérale, le canton de Vaud ne sera pas en mesure de bénéficier de la compensation fédérale, ni de la hausse des contributions des sociétés au bénéfice des statuts spéciaux. Afin de pallier ce manque, le canton procédera à des provisions dans ses comptes 2017 et 2018.

Yves Reichenbach (24.08.2015; 29.06.2018)

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